Tribune : ''Sacrifier les chinois pour les investisseurs américains...pourrait être une erreur fatale à éviter à tout prix,  un piège pour 2023.'' (Piaget Mpoto)

Vendredi 24 janvier 2020 - 20:19
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L’urgence pour la RDC de rétablir un partenariat stratégique et dynamique avec la Chine.

La Chine, nouvel acteur incontournable de la reconstruction congolaise

Dans le cadre de la politique du développement prônée par le Président de la République, la volonté du Gouvernement exprimée à travers son programme, il sied d’arrêter les principes clairs qui doivent fonder la relation diplomatique entre la RDC et la Chine; de déterminer les objectifs à atteindre et d’arrêter les stratégies conséquentes à mettre en œuvre.

L’énorme projet de ‘One belt One Road’ mis en place par le président chinois Xi Jinping en 2013, lequel peut s’avérer bénéfique pour la RDC, si et seulement si notre diplomatie pourrait bien jouer le jeu comme le font l’Ethiopie,  le Kenya,  ou même la Tanzanie. Au regard de ses riches ressources minières, forestières, et halieutiques; une bonne diplomatie qui se veut économique à l’égard de la Chine ferait que cette dernière, dans son programme de« routes de la soie », construise, comme il le prévoit, des routes et chemins de fer reliant l’océan Indien à l’océan Atlantique, ou du nord au sud de l’Afrique via la RDC, et ceci serait d’autant plus profitable  au pays qu’il lui permettrait de jouer ce rôle de pivot continental. Faudrait-il rappeler le vœu du Chef de l’Etat congolais exprimé à travers son allocution, du 13 Décembre 2019 sur l’Etat de la nation devant le Parlement réuni en Congres, je cite : « Mon rêve est celui de voir Cap Town être relié au Caire, Mombasa à Lagos en passant par la RDC,…..s’agissant de l’intégration africaine, ma vision a toujours été claire. Il faut y aller par étape en commençant par l’intégration régionale. Ce qui nous oblige à construire des infrastructures routières, ferroviaires, fluviales et lacustres pour assurer l’interconnexion de l’ensemble de nos provinces ». Tout est dit.

Il est désormais impossible de parler de la reconstruction de la RDC sans évoquer la Chine, dont la volonté de jouer les premiers rôles dans la reconstruction du pays peut susciter,  chez les congolais, intérêt et inspiration.
Ceci étant, il est impératif d’établir entre la RDC et la Chine un nouveau partenariat stratégique dynamique, principalement en matière de développement économique et social, sur la base de l’égalité et du respect mutuel, en vue de renouveler, de développer et d’élargir davantage cette coopération dans ce siècle courant.

Le bannissement de toute idée de bloc (bipolarité) dans la diplomatie congolaise
Sans nous voiler la face, à cause de son cobalt, la RDC est convoitée pour ne pas dire tiraillée entre les grandes puissances, la Chine et les USA en ligne de mire. Les USA avaient fui lorsque le court des minerais était trop bas. La Chine en a profité et a commencé à les racheter. Aujourd’hui qu’il y a embellie dans le domaine, les USA veulent rentrer avec toute une liste des conditions. Face à un tel dilemme, le Président doit user de la haute diplomatie pour satisfaire les intérêts des uns et des autres sans les opposer ou prendre partie pour tel partenaire au détriment de tel autre.

Pour rappelle, il sied de signaler les progrès enregistrés, dans le domaine de la promotion des échanges commerciaux et des investissements par  L’Egypte, l’Afrique du sud,  le Kenya, l’Ethiopie ou même le Rwanda pour ne citer que ces quelques pays africains,  dans leur coopération avec la Chine, alors que ces pays précités sont des partenaires traditionnels des Etats-Unis d’Amérique. 

Sacrifier les chinois pour les investisseurs américains qui ont promis arriver au Congo, nous voila une année,  pourrait être une erreur fatale à éviter à tout prix,  un piège pour 2023.
Ce qu’il sied de noter aussi, ce que nous sommes un pays qui a besoin de diversifier ses partenariats pour booster notre économie et stabiliser nos institutions. La Chine et les USA nous sont tous deux indispensables. D’ailleurs,  malgré la guerre économique qu’ils se font, ils coopèrent entre eux de façon massive. La Chine est avec l’UE les premiers partenaires économiques des USA, de même que les USA et l’UE le sont pour la Chine. Par habileté diplomatique, nous pouvons nous transformer en un point d’intersection entre ces deux superpuissances au lieu de demeurer, éternellement un terrain d’affrontements géopolitiques.

La logique des blocs (guerre froide,  bipolarité…) est dépassée et nous vivons dans un monde multipolaire ou l’interdépendance en est le moteur. Nous avions pu voir certains pays européens résister à l’idée des sanctions contre la Russie car il y a une très grande interpénétration des économies et de la coopération militaire et stratégique. L’idée des blocs est déjà abandonnée par ceux qui l’ont créée, cela nous profite.
Aujourd’hui nous sommes obligés de coopérer avec les USA, qui sont nos partenaires traditionnels et un grand soutien dans le cadre des institutions de Bretton woods,  de la gouvernance et de la défense ; mais aussi avec la Chine dont les finances et la coopération technique (infrastructures) nous sont très utile. Cette complémentarité est un atout non négligeable pour le développement de la RDC. 

A ce jour, tout le monde court chercher les financements en Chine, y compris les pays développés et émergents. Et une fois en Chine, ni Emmanuel Macron, ni non plus Donald Trump, personne, ne tient un discours du genre « droit de l’homme, démocratie,… », Ici ils parlent « business, Investment, Coopération and money ». C’est sur que ca demande beaucoup de prudence et d’habileté diplomatiques, mais si les autres sont parvenus à mettre ces deux puissances dans le même circuit sans causer d’explosion, donc la RDC pourra aussi le faire avec succès. D’ailleurs, comparativement à l’Ethiopie, au Kenya ou même à l’Egypte, la RDC  a beaucoup plus d’opportunités à présenter, concomitamment aux USA et à la Chine et d’en tirer profit.

Pour ce faire,  si nous réussissons cet exercice diplomatique exquis, nous n’aurons à craindre ni la balkanisation, ni le pillage de nos ressources naturelles,  ni les affrontements entre grandes puissances par individus interposés, ni la fuite des investisseurs,  car chacun connaitra ses limites et ce qu’on attend de lui. C’est un projet qui demande beaucoup d’études, un grand niveau de maturité et une forte  expertise. C’est un projet subtile et délicat, mais qui, au finish fera entrer la RDC dans une nouvelle ère, et le Président de la République restera dans les annales de ce pays comme celui qui aura fait sauter ce verrou.

Avis et considérations

Nous estimons que la RDC et la Chine doivent améliorer les mécanismes de consultations bilatérales existants pour intensifier les liens intergouvernementaux, explorer de nouveaux champs de coopération et partager leurs expériences en vue de renforcer leur partenariat mutuellement avantageux. Ceci peut être possible avec la promotion des échanges de visites de haut niveau afin de créer un climat favorable aux contacts et échanges commerciaux entre les deux pays. Il est plus qu’urgent pour la RDC de contribuer au raffermissement de l’amitié sino-congolaise et  de s’investir dans le réchauffement des relations diplomatiques entre les deux pays,  notamment en matière de développement économique et social sur la base de l’égalité et le respect mutuel, en vue de renouveler,  de développer et d’élargir cette coopération dans la nouvelle décennie qui vient à peine de commencer.
Pour ce faire, ce chapelet de bonnes intentions égrainé ci-haut requiert entre autres, la présence à Pékin des diplomates congolais actifs et les meilleurs de ses filles et ses fils qui ont étudié la diplomatie dans les grandes universités chinoises; qui maitrisent la marche des affaires du monde et qui s’investiraient à prendre des contacts dans les milieux décisionnels de la diplomatie chinoise et représenter le Congo dans tous les forums économiques et commerciaux afin de stimuler le commerce dans les deux sens et de faciliter aux entrepreneurs congolais l’accès au marché chinois.

Piaget Mpoto ([email protected])