FRANÇOIS MUAMBA : " LE DIALOGUE EST INCONTOURNABLE "

Lundi 8 juin 2015 - 08:36

Lorsque le vendredi 5 juin, François Muamba franchit le seuil du bureau du Président, tous les observateurs sont formels : cette consultation- là déborde du cadre classique stricto sensu. Et pour cause, l’hôte du chef de l’Etat est le dépositaire du bréviaire de la paix régionale et de la réconciliation nationale qu’est l’accord - cadre d’Addis-Abeba. Alors, le Dialogue en vue ? Cela va de soi chez ce coordonnateur du Mécanisme national de suivi du compromis signé dans la capitale éthiopienne le 24 février 2013. C’est vers donc cet homme qui a le Dialogue dans son ADN qu’une brochette de journalistes s’est tourné pour avoir tous les ressorts de de cette grande palabre à la congolaise qui pointe à l’horizon. Comme dans une espèce de raisonnement par l’absurde rondement mené, François Muamba Tshishimbi démontre que toutes les hypothèques sur le processus électoral avec en ligne de mire l’horizon 2016 ont vocation à être débattues au…Dialogue. Pour avoir vécu intensément les expériences électorales de 2006 et 2011, François Muamba rappelle la violence - y compris armée pour ce qui est de 2006- qui a marqué ces scrutins. Or, la spécificité de 2016, c’est qu’il y a un Président qui achève son deuxième et dernier mandat. Où alors, devrait-on se retrouver pour se prémunir d’éventuelles conséquences fâcheuses des élections à venir ? Dans quel cadre évacuer la controverse autour du calendrier électoral ? Où et comment régler la question des congolais fraîchement majeurs et donc en âge de voter ? Le cycle électoral coûtant plus d’un milliard de dollars, comment débattre de cette difficulté réelle ? Bref, le coordonnateur du MNS trouve, avec force pertinences, mille et une raisons pour les Congolais de se retrouver dans le cadre du Dialogue. Un exercice cathartique qui fait que ce pays à nul autre pareil a su conjurer toutes les menaces existentielles. De par sa vocation même, le " cordon " du MNS est d’autant plus à l’aise dans cette croisade pro dialogue que parmi les engagements nationaux que charrie l’Accord-cadre se trouve gravé dans le marbre la promotion de la réconciliation nationale, de la tolérance et de la démocratisation. C’est donc l’un des hommes clé de la paix que quatre journalistes ont " traqué " le week-end. Avec succès. 
Le chef de l’Etat vous a reçu en quelle qualité ? Si c’est en tant que Coordonnateur du Mécanisme national de suivi de l’Accord-cadre, quel devrait alors être votre rôle au moment où le chef de l’Etat entame les consultations ?

Le chef de l’Etat a donc bien voulu effectivement nous recevoir. En ce qui me concerne en ma double qualité de président du parti politique Adr (Alliance pour le développement et la République, Ndlr), c’était la première partie de l’entretien que le Président de la République a voulu nous accorder. Le compte rendu par rapport à cet aspect-là des choses a été fait par le coordonnateur de l’Adr. Je ne reviens donc pas sur cet aspect-là. Il y a eu un deuxième temps où le Président de la République a reçu le coordonnateur du Mécanisme national de suivi (MNS). Mon rôle est clairement mentionné dans les missions qui sont celles du MNS. Vous le savez, notre pays, en souscrivant à l’Accord-cadre, a pris des engagements très précis au niveau national. Il s’agit des engagements souverains dont l’exécution ne dépend que de la seule RDC. Il y en a six. Et parmi ces six engagements il y en a un qui est transversal et qui, par rapport à la situation dans laquelle nous nous trouvons, à l’actualité et à la perspective électorale qui est devant nous, mentionne très clairement que nous devons promouvoir la réconciliation nationale, la tolérance et la démocratisation. Et donc à ce titre là, le MNS a un rôle central puisque anticiper sur la mise en œuvre de l’ensemble des engagements en général et de celui-ci en particulier stipule effectivement que nous puissions également être de ceux qui joueront un rôle catalyseur. C’est-à-dire favoriser et communiquer autour de cette question. Nous en avons parlé effectivement avec le Président de la République qui nous a indiqué la feuille de route en ce qui concerne le rôle du coordonnateur.

Cette période-ci prête à polémique. Comment vous situez, maintenant que vous avez été reçu par le Président, cette période qu’on appelle les consultations parce qu’en lisant l’Accord-cadre qui légitime le dialogue, on ne parle pas de consultations. Comment vous situez politiquement l’initiative du chef de l’Etat parce qu’elle prête à confusion, elle amené d’autres personnes à ne pas aller à ces concertations. Qu’est-ce que vous avez compris de cette initiative ? 
Je ne m’inquiète pas du tout par rapport à l’implication des uns et des autres, que ce soit de l’Opposition, de la Majorité ou de ce qui est convenu d’appeler la société civile. Je ne m’en inquiète pas du tout. Je pense qu’à ce point de départ, il y a peut-être des malentendus et de mélange de genre. Ce qui est entrain de se passer dans cette séquence est quelque chose de tout à fait normal. Nous étions en guerre, nous avons signé l’Accord-cadre, nous avons pris un certain nombre d’engagements notamment au titre des engagements nationaux. Il y a par ailleurs des engagements régionaux et internationaux et il y a par ailleurs les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité notamment la Résolution 2098 qui date de l’année dernière et celle du mois de mars de cette année, la Résolution 2211. Tous ces instruments sont, en réalité, des instruments qui se complètent. Au point de départ, pour finir la guerre on signe, on prend des engagements de manière à ce que nous puissions dégager…Rappelez-vous Goma a été occupé et le Président de la République avait indiqué que l’on recourra à l’armée, à la diplomatie et à la politique. Et donc la branche diplomatique est allée à Addis-Abeba et on a signé ces engagements là et Goma était libéré. Nous sommes maintenant dans la prise des décisions subséquentes par rapport à ces engagements. Tout ça est tout à fait logique et tout à fait normal. Qui devait faire quoi ? En ce qui concerne les engagements nationaux, je l’ai dit en introduction, il s’agit des engagements souverains. Les six engagements (l’armée, décentralisation, réforme structurelle, économie etc… en ce comprise la promotion de la réconciliation nationale), la RDC n’a des leçons à recevoir de personne, n’a d’ingérence à attendre de personne. Il s’agit des choses que nous devons faire, et nous nous sommes doté des instruments. Et il y a le Gouvernement qui est à la tâche, et il y a le MNS qui est l’élément catalyseur de communication par rapport à tout ce qui doit se faire et en particulier par rapport à ce qui se fait. Et donc, je répète, le Président de la République, en prenant cette initiative, a tenu compte, non seulement de cet aspect qui structure un peu l’agenda et la démarche de la RDC. Rappelons-nous, dans un premier temps il y a eu quand même ce qu’on a appelé dans ce pays les concertations nationales. Il se trouve simplement qu’avec du recul on constate qu’à mesure que nous nous approchons des élections, les concertations nationales n’ont pas abordé ce sujet là pour une raison simple : nous étions en 2013 pour des élections en 2016 et donc j’allais presque dire que le problème en ce temps-là ne se posait pas. Ce problème se pose aujourd’hui. Pourquoi ? Tout simplement parce que nous ne sommes pas un pays ordinaire. Nous sommes un sous-continent. Nous sommes un pays dont certains historiens ont qualifié de mosaïque, de tribus et d’ethnies. Mais, remarquez qu’à chaque fois que nous devons traverser une sorte de zone de turbulence, -il y en a eu tout de même plusieurs depuis 60 dans notre pays-, nous avons une pratique dans ce pays qui nous a chaque fois permis de pouvoir traverser ces zones avec un minimum de cohésion qui fait que ce pays tient. Puisqu’on peut même poser la question de savoir cette mosaïque elle tient à quoi depuis 50 ans. C’est cette culture qui a consisté chaque fois que nous avions eu l’impression que nous allions dans le mur et que les choses allaient imploser, les Congolais se sont retrouvés que ça soit à Tananarive, que ça soit à Sun-City, Lusaka etc.… et dernièrement encore, -même c’est avec des résultats mitigés pour régler le problème CNDP à l’Est, on a vu la combinaison armée-diplomatie pour dégager le M23. Aujourd’hui de quoi s’agit-il ? Il s’agit de créer les conditions à partir desquelles les élections, qui sont la voie royale pour accéder aux responsabilités d’Etat, compte tenu de la complexité de la situation que j’indique dans notre pays, aller à ces élections postule que tout cela soit préparé. Les conditions dans lesquelles on va aux élections sont au moins aussi importantes que les élections elles-mêmes. Exemple : si nous sommes là à discuter autour de la problématique par rapport aux élections qui viennent, est-ce parce qu’il n’y a jamais eu des élections dans notre pays ? On a bien eu des élections d’ailleurs qu’à l’international on a qualifié d’exemplaires en 2006. Mais qui a oublié in fine qu’en 2006, on a quand même été obligé de dégager de la ville de Kinshasa en pleine capitale un adversaire politique par les armes. On l’a sorti des chars. Est-ce qu’on l’a oublié ? En 2011, on est passé de très peu à côté de la catastrophe. La violence quasi généralisée a été exercée pas par une seule famille politique, les uns par rapport aux autres. Est-ce qu’on l’a oublié ? Allons-nous en 2016 sans avoir, j’allais dire, expurgé la RDC de tout ce passé dur et mieux se préparé. Alors même qu’on constate qu’il y a des nouveaux défis qui se présentent d’une manière spécifique par rapport à 2016. 2016 n’est pas à tout point comparable à 2011. Nous avons cette question constitutionnelle qui fait que pour le Président de la République, c’est son deuxième et dernier mandat. Ce n’est pas un détail. Il y a cette question qui concerne le calendrier aujourd’hui dit global. On voit très bien la nécessité qu’il y a d’en faire un calendrier consensuel. Allons-nous d’une manière sérieuse dans ce pays, aller aux élections sans avoir réglé le problème de nos jeunes qui n’avaient pas 18 ans en 2011 ? Toutes ces questions, en effet, le Président de la République, tenant compte du fait que les concertations nationales, non seulement n’ont pas eu pour matière le règlement de ces problèmes de fond et qu’aujourd’hui se plaçant dans la volonté de pouvoir, là où il est par rapport à ses responsabilités en tant que garant de la Nation de pouvoir donner des réponses qui permettent à la Nation de traverser cette zone, a répondu à l’appel de ceux qui n’étaient pas aux concertations et qui ont, depuis, demandé à ce qu’il y ait un autre forum à caractère inclusif et qui permette de débattre de ces questions-là. Et donc c’est en recherchant les modalités de donner corps à cette demande, qui est une demande de l’Opposition fondamentalement, que les consultations sont entrain de se dérouler

Il y a polémique sur ces concertations organisées avant le dialogue. Egalement polémique sur qui devra convoquer ce dialogue. Pour certains leaders de l’Opposition c’est Martin Kobler qui représente la communauté internationale, pour d’autres c’est Joseph Kabila. Ceux qui attribuent ce rôle à Martin Kobler évoquent la résolution 2098, pour le camp de la Majorité cette résolution ne suspend pas le principe de la souveraineté nationale. Comment considérez-vous cette question étant donné que pendant longtemps vous avez fustigé cette tendance maladive de l’Opposition à chercher l’arbitrage de la communauté internationale dans les problèmes purement nationaux… il n’y a-t-il pas une sorte de paradoxe ? 
Non non, il n’y a pas de paradoxe du tout. Je vais dire que les choses se complètent admirablement. Revenons aux textes. Qu’est-ce qui est dit dans l’Accord-cadre au chapitre 5 qui dispose des engagements nationaux, la promotion de la réconciliation nationale… Vous savez quand on dit réconcilier, ça veut dire il faut trouver les moyens de pouvoir réconcilier. Et l’instrument, l’outil, c’est le dialogue. Pour faire ça, on n’a besoin de personne. Maintenant les résolutions pertinentes des Nations Unies. Vous parlez de 2098 et de la Résolution 2211. Quelle est la pertinence de ces résolutions ? Ça vient résoudre quel problème, dès lors que nous parlons-là des matières qui sont les mêmes. Si vous allez dans 2098 au point 14b vous trouverez " promotion de la réconciliation nationale ", si vous allez dans 221 au 15a vous trouverez " promotion de… " ça paraît concurrentiel, mais en réalité ça se complète. Comment ? Au point de départ c’est un engagement national. Au point de départ c’est nous-mêmes qui disons nous allons vers. Au point de départ il s’agit pour la RDC de faire. Si nous le faisons, 2098, 2211 transforment les personnalités qui sont visées là-dedans, dans 2098 en effet, c’est le représentant résident du secrétaire général des Nations Unies. Dans 2211 ce sont les deux : l’Envoyé spécial qui est Monsieur Djinnit et le résident qui est Monsieur Kobler. Ils deviennent automatiquement des témoins. Qu’est-ce qu’on va faire avec Monsieur Kobler, qu’est-ce qu’on ferait avec Monsieur Djinnit dès lors que sur le plan national et d’une manière souveraine nous aurons vidé la question de la réconciliation nationale, tolérance et démocratisation. Mais ces gens-là deviennent automatiquement des témoins voire des avocats de la République. Le seul problème, ce que je souhaiterais que dans ce pays-là à l’endroit où nous nous situons ce qu’on appelle les élites, la classe politique, ce qu’on appelle les gens qui incarnent et représentent la Nation congolaise on ait cette compréhension que parfois c’est nous-mêmes qui prêtons le flanc. C’est facile de se plaindre des ingérences, c’est facile de se plaindre de ce que les étrangers viennent se mêler des choses qui ne leur regardent pas. Mais lorsque nous avons pris nous-mêmes l’engagement de faire quelque chose, pourquoi ne pas tout simplement le faire et alors en ce moment-là le faire ? Si d’aventure, il y a un qui veut se mêler de ça, on va dire de quoi tu te mêles. Mais si nous le faisons pas, nous ouvrons la porte à une sorte d’imposition que nous n’aimons pas, nous ne voulons pas et qui ferait que constatant que les Congolais ne le font pas, c’est alors en ce moment-là que ces gens-là auront trouvé un rôle. C’est l’invitation à laquelle je m’emploie à communiquer à nos élites : faisons ce que nous avons dit que nous allons faire. Non seulement c’est bon pour les Congolais, en même temps nous aurons fermé la porte à toute aventure du type ingérence.

Monsieur le Coordonnateur, ça ne vous a pas échappé qu’une bonne partie de l’Opposition jusque là boude les consultations initiées par le chef de l’Etat. Et si cette opposition qui est quand même constituée de gros calibres, notamment l’UDPS, le MLC, et UNC, campait sur ses positions, donc ça invaliderait ce que vous êtes entrain de dire ? En d’autres termes ça nous amènerait à une espèce de médiation internationale ?
Non, pas tout à fait. D’abord notons, constatons que les positions des uns et des autres notamment au sein de l’Opposition sont quand même des positions nuancées. Les uns et les autres ne disent pas " non " pour les mêmes raisons. Prenons l’UDPS, que dit l’UDPS ? L’UDPS dit le dialogue est une initiative du président de l’UDPS Etienne Tshisekedi. Ça date de plus d’un an, exprimé dans un courrier en son temps adressé à Monsieur Kobler. En annexe de ce courrier, il y a une feuille de route très claire qui aborde tous les sujets qui sont mis aujourd’hui sur la table, à savoir : est-ce que c’est opportun ? Quel format ? Quel agenda c’est-à-dire quel ordre du jour ? Pendant combien de temps ?... Ces choses-là sont mentionnées dans une feuille de route adressée en son temps, il y a un peu plus d’un an, à Monsieur Kobler par l’UDPS. C’est ce que l’UDPS rappelle en disant : " vous voudrez nous poser à nous UDPS aujourd’hui des questions par rapport auxquelles nous avons déjà anticipé en disant il faut ce dialogue et en voici les éléments déterminants ". C’est pour cela qu’à ce stade, sauf erreur de ma part ou mauvaise compréhension de cette démarche de l’UDPS, il me semble que la quintessence du " non " de l’UDPS n’est pas un " non " au dialogue. Ils revendiquent qu’ils en sont les initiateurs. A la question de savoir faut-il des consultations de type contact préalable, ils renvoient à leur feuille de route en disant pour eux cette étape-là est sans objet. Ils vont se remettre en mouvement lorsqu’on passera à l’étape suivante. Je note également au passage que parmi les propositions qui sont dans la feuille de route de l’UDPS, il y a cette question de qui doit effectivement organiser ce dialogue. C’est leur point de vue. Mais puisqu’on va au dialogue n’est-ce pas justement dans ce cadre-là que les points qui seraient opposés pourraient trouver un consensus. Il y a des gens qui disent " non " par principe. Je pense que ce sont des choses qui peuvent se régler avec davantage d’explications. Il n’y a pas ici une démarche où on chercherait à piéger quelqu’un. La seule question est, est-ce que les sujets qui sont supposés devenir les sujets de ce dialogue sont des sujets qui ne peuvent pas trouver des réponses autrement ? Par exemple la question du calendrier aujourd’hui global et qui est critiqué par tout le monde y compris dans la majorité. Ce n’est pas étonnant. On nous a présenté un calendrier global mais avec une kyrielle de défis. Parmi ces défis par exemple, il y a cette question du coût. Des élections qui coûteraient au total 1 milliard 200 millions de dollars. D’abord, est-ce que ce coût correspond à une réalité ? Deuxièmement, puisque ce sont nos élections et c’est vrai nous sommes fiers de notre pays, nous sommes fiers de notre souveraineté etc. Allions-nous pouvoir mettre sur la table 1 milliard 200 millions pour ces élections-là ? Et si ce n’est pas le cas, à quel moment le Gouvernement de la République va-t-il avoir le courage, -ce n’est pas un tabou-, de dire à la Nation ça va coûter 1 milliard 200 millions mais je ne peux mettre qu’autant. De sorte à ce qu’on puisse se poser la question subsidiaire d’où viendrait le financement du gap. Aujourd’hui, nous savons à l’avance qu’en ce qui concerne nos partenaires, ils ont le regard sur la Présidentielle 2016. Or, nous avons programmé sur 2015-2016 une série des choses etc.… Qui va in fine trancher de cette question ? Je note que ça apparaît très clairement dans les échanges que le Président de la République a bien voulu accorder au Coordonnateur hier (Ndlr : vendredi dernier). Il n’entend pas être chez lui et dit ça sera comme ça et pas autrement. Il dit que l’Opposition a voulu que ces genres des questions fassent objet d’une discussion inclusive. Et que de ce point de vue il est prêt effectivement à aller à une discussion qui permettrait de trouver un consensus sur un sujet comme celui-là. Tout à l’heure j’avais évoqué, il faut pouvoir le répéter, cette question des jeunes qui n’avaient pas 18 ans en 2011. Qui va trancher de cette question puisque il est dit que nous sérions, -en tout cas, en ce qui concerne 2015-, dans un processus de rattrapage des arriérés au niveau électoral. Mais enfin, nous sommes en 2015, aujourd’hui un adulte congolais, à qui la Constitution confère des droits, vous allez lui dire les vieux vont voter, vous les jeunes vous ne votez pas ! Est-ce que ça tient la route ? Mais qui va pouvoir trancher de cette question ? Mettons-nous autour d’une table et voyons dans quelle mesure d’une manière consensuelle on y apporte une réponse. La question de sécurité, la question concernant ce que l’opposition qualifie de détenus politiques. Alors trouvons un mécanisme à partir duquel on tranche de cette question et nos frères, si leur présence en prisons ne se justifie pas, puissent sortir. La sécurisation du processus, -j’en parlais tout à l’heure-, non seulement par rapport aux acteurs mais par rapport au lieu. Vous savez nous sommes quand même dans un pays où au niveau des bureaux de vote surgissent parfois de petites bandes, je n’ose pas dire des commandos, qui vous ramassent des urnes etc.…. Donc tout cela a un coût une fois de plus. Quand est-ce qu’on va pouvoir en parler et trouver effectivement d’une manière consensuelle la manière de pouvoir aller. C’est ça qu’on appelle les élections apaisées. Maintenant, entre ceux qui auraient des arrière-pensées par rapport à si ça va glisser… justement autour de cette table, d’une manière consensuelle, on se mettrait d’accord sur un certain nombre de ligne rouge à partir de laquelle, une fois de plus, les Congolais iraient à ces élections-là dans des conditions qui permettent de préserver leur pays de ce qu’on a vu en 2006 et davantage encore en 2011. Nous disons nous sommes dans un processus de démocratisation et ça n’aurait de sens que si d’une élection à l’autre, nous améliorons notre façon de trancher les questions de légitimité et la question de savoir qui est le chef et pour combien de temps.

Pour une certaine classe politique notamment l’UDPS, l’UNC, la crainte, c’est que ces consultations, ce dialogue est une manière cachée de la Majorité d’amener au glissement…
D’abord la question politique : glissement, pas glissement, mais où est-ce qu’on va en discuter ? Comment les gens qui, par exemple, sont foncièrement contre la possibilité d’un glissement, où est-ce qu’ils vont faire valoir leur point de vue ? A supposer qu’il y ait un point de vue contraire en face. Une fois de plus ça nous ramène au dialogue. Un consensus c’est un résultat qu’on obtient par la force des arguments. Tant qu’on aboutit à un consensus il n’y a plus de violence. Et ce qui est recherché ici, c’est des élections sans violence. Donc c’est une raison j’allais presque dire supplémentaire pour aller faire valoir son point de vue et même découvrir d’une manière claire et nette quelles sont les visées et les attentes de l’autre. Parce qu’aujourd’hui, admettez tout de même qu’on est beaucoup quand même dans la rumeur. En ce qui concerne le Président de la République, à quel moment a-t-il dit qu’il ne va pas quitter son poste à la fin du deuxième mandat ? A quel moment aurait-il dit que son propos, sa démarche c’est le glissement ? En allant à la table de négociation, même si ce n’était pas dit, mais que c’était cela, mais eh bien on le verra par la manière dont éventuellement on va argumenter. Je vais dire que quelque soit le biais par lequel on aborde cette question, le dialogue est incontournable.

Les activités du MNS vont-elles se limiter au Kasaï-Oriental ? 
S’agissant des activités du MNS, nous avons pour vocation, nous l’avons dit lors du deuxième anniversaire de l’Accord-cadre, que nous allions, nous MNS, faire de l’année 2015 une année de forte communication, vulgarisation du contenu de cet accord qui est souvent hélas méconnu et en particulier en ce qui concerne l’engagement numéro 6 qui dispose que nous devons promouvoir la réconciliation nationale, tolérance et démocratisation. Et donc ce disant, je suis simplement entrain de dire que ce que nous avons fait dernièrement au Kasaï-Oriental notamment à Mbuji-Mayi sous une forte communication et conférences etc.…. est quelque chose que nous allons, bien entendu, répéter sur l’ensemble du territoire national autant que le temps et les aspects matériels vont nous le permettre. Je pense notamment au Katanga, au Kasaï-Occidental pour ne parler que des choses qui sont programmées. Mais, par la suite bien évidemment sur le plan Ouest et dans le Nord, en ce compris le Bas-Congo et le Bandundu. Donc nous allons continuer de le faire. Nous sommes fiers aujourd’hui avec le séminaire de haut niveau qui vient de se tenir à la Cité de l’UA il y a trois jours sous l’égide du Premier ministre. Nous sommes fiers, nous MNS, après avoir fourni à l’Etat, une matrice qui permet effectivement sur le plan technique de pouvoir s’assurer que ce qui a été pris comme engagements va pouvoir se faire. Avec ce séminaire, nous avons franchi un pas supplémentaire puisqu’il y a eu non seulement appropriation du contenu de cette matrice par le Gouvernement, mais c’est un processus très intéressant parce qu’ici et maintenant chaque ministère, chaque acteur concerné par les réformes va pouvoir tirer de cette matrice ce qui est nécessaire en ce qui le concerne. Elaguer ce qui est déjà fait parce que les réformes n’ont pas commencé avec la signature de l’Accord-cadre. Ce sont des choses mises en œuvre parfois depuis longtemps dans un certain nombre de secteurs. Lorsqu’on élimine ce qui est déjà fait, il reste ce qui reste à faire et de ce qui reste à faire il s’agira pour chacun d’établir les priorités et de les mettre dans un chronogramme. Et nous avons travaillé avec le ministère du Plan pour créer des conditions à partir desquelles tout ce qui devra se faire en 2016 puisse trouver aujourd’hui le crédit budgétaire quant à ce. C’est pourquoi, vous avez vu des dates antérieures aux discussions conférences budgétaires. Et nous avons maintenant l’assurance à partir de la Primature que lorsque les différents ministres (présidents des groupes thématiques) auront priorisé les choses et établi ce qui doit se faire entre maintenant et fin 2016, ils iront avec ça aux discussions budgétaires. Et nous serons assurés que désormais notre budget, qui vit sa propre vie, sera ramené par rapport aux priorités concernées par l’Accord-cadre. Et cette jonction va pouvoir se faire. Je vais dire sur le plan technique on parle de la modernité etc.… il y a là un travail excellent qui a été fait et je félicite au passage tous les experts au niveau du Gouvernement, au niveau du MNS, au niveau de nos partenaires parce qu’on a fait ce travail notamment avec la Monusco et les gens du PNUD. Tout le monde s’est impliqué là dedans et aujourd’hui effectivement nous attendons avec intérêt ces conférences budgétaires. Et nous aurons un budget qui a un rapport avec les priorités de la République.

Mais ce séminaire a fait valoir la nécessité de mettre en place un médiateur national. Est-ce que le MNS ne se sent pas presque mandaté pour jouer ce rôle là ? 
Le principe a été émis et nous avons accueilli cette proposition avec beaucoup d’intérêt puisqu’effectivement comme vous le dites si bien, ça rentre dans le cadre des attributions ordinaires de ce Mécanisme. Mais un mandat comme celui-là, au vu des enjeux dont on parle, doit être un mandat explicite. Après que le principe ait été émis, il appartient notamment au Président de la République de pouvoir éventuellement couler cela sous forme d’une instruction explicite. Et vous le savez nous n’allons pas nous dérober à nos responsabilités. Travailler pour la Nation est un devoir pour nous. Propos receuillis pour Forum des As par José NAWEJ