Intrusion de l’armée rwandaise sur le sol congolais : divergences à Kinshasa

Mercredi 20 avril 2016 - 18:45
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Des soldats rwandais ont-ils franchi les frontières congolaises ? A Kinshasa, des avis divergent. Si le gouvernement se réserve, dans les Instances supérieures des Forces armées de la RDC, on est convaincu de la présence des militaires rwandais dans certaines zones de la province du Nord-Kivu.

 

« L’armée rwandaise a bel et bien été en territoire congolais», a confirmé hier mardi 19 avril le directeur de la presse de la 34ème région militaire des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), le capitaine Guillaume Ndjike Kaiko.

 

Il a fait cette déclaration lors de la présentation à la presse des résultats de l’enquête de la délégation de l’armée effectuée dans la matinée dans les localités de Kabagana 2 et Chegera, en groupement de Kibumba, dans le territoire de Nyiragongo (Nord-Kivu).

 

Selon Radio Okapi qui a livré cette information, la délégation de l’armée congolaise avait pour mission d’enquêter et recueillir les témoignages de la population et ses chefs sur les allégations de la présence des militaires rwandais sur le sol congolais.

 

A en croire les témoignages de la population relayées par la radio onusienne, des centaines de militaires de l’armée rwandaise ont fait incursion sur le territoire congolais par la borne de délimitation des frontière n°123, le samedi 16 avril 2016.

D’après la population et ses chefs, ces militaires rwandais ont exploré la zone congolaise à plus ou moins 2 km jusqu’à l’Ecole primaire Amour et Paix du village Chegera, à une trentaine des kilomètres au Nord de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu.

Ces militaires de l’armée rwandais sont «à la recherche des rebelles rwandais des FDLR dans une école du groupement Buhumba », précisent les témoins cités par Radio Okapi.

La population renseigne également que ces militaires rwandais disaient que l’EP Amour et Paix serait la base des FDLR. Alors que la même population déclare n’avoir jamais vu un seul FDLR dans la région.

La radio onusienne rapporte que le directeur de la presse de la 34ème région militaire et porte-parole des opérations Sokola 2, le capitaine Ndjike Kaiko Guillaume assure que la zone est maintenant sécurisée.

« Nous avons contenu l’armée rwandaise à un certain niveau pour qu’elle ne puisse pas avancer et par après on s’est rendu compte que l’ennemi est rentré chez lui. Mais parce qu’il y a un mécanisme de vérification, nous donnons le temps au temps mais juste après les résultats, nous en tirerons toutes les conséquences possibles», a-t-il indiqué.

 

KIGALI ACCUSE...

Le Rwanda a accusé, le samedi 16 avril, les FDLR, basés en République démocratique du Congo, d’avoir attaqué un poste de police dans l’Ouest du pays. La seconde incursion en quelques semaines selon Kigali.

 

Selon le communiqué du ministère rwandais de la Défense, l’infiltration menée par « des présumés éléments terroristes FDLR» a eu lieu dans la nuit de vendredi à samedi.

Les assaillants ont attaqué un poste e la police nationale dans le district frontalier de Rubavu.

Selon le porte-parole adjoint de l’armée rwandaise cité par RFI, ces derniers ont été repoussés et la situation est depuis sous contrôle.

 

Le lieutenant-colonel René Ngendahimana n’a toutefois pas précisé le nombre d’assaillants présumés, ni s’il y avait eu des victimes.

Déjà le 24 mars, l’armée rwandaise avait assuré avoir été attaquée dans le même district par des hommes vêtus d’uniformes de l’armée congolaise et indiqué avoir abattu l’un d’entre eux.

Cette attaque avait ensuite été attribuée aux FDLR par le président rwandais Paul Kagame.

 

La présence de la rébellion hutue rwandaise dans l’Est de la RDC empoisonne les relations entre les deux voisins. Kinshasa accuse régulièrement le Rwanda de déstabiliser sa façade orientale.

 

De son côté, le gouvernement rwandais reproche aux autorités congolaises de ne rien faire pour mater la rébellion, voire de la soutenir.

 

...KINSHASA SE RÉSERVE

Les FDLR sont présentes dans l’Est de la RDC depuis la fin du génocide au Rwanda en 1994, au cours duquel environ 800 000 personnes ont perdu la vie. Opposées au président Paul Kagame, qui a pris le pouvoir à l’issue des massacres, les FDLR sont toujours considérées par Kigali comme une menace stratégique majeure.

 

A Kinshasa, les autorités se veulent prudentes et estiment qu’il est trop tôt pour savoir qui a mené cette attaque. Elles réaffirment en même temps leur engagement dans la lutte contre les FDLR.

 

Au moment où la RDC se prépare aux élections, la présence des militaires rwandais est commentée dans tous les sens. Est-ce une intrusion pour détourner l’attention des Congolais sur les élections ? On n’est pas loin d’une telle assertion.

Par LP