RDC : L’Opposition accuse le bureau de l’Assemblée nationale de bloquer l’aboutissement du contrôle parlementaire

Lundi 18 mai 2015 - 08:33

Les députés de l’opposition ont suspendu leur participation aux séances plénières de l’Assemblée nationale.

Les présidents des groupes parlementaires de l’Opposition et bien d’autres députés ont réaffirmé leur décision dans une correspondance adressée, vendredi 8 mai 2015, au président de la Chambre basse du Parlement, Aubin Minaku.

Ces députés opposants accusent le bureau de l’Assemblée nationale de bloquer l’aboutissement du contrôle parlementaire au sein de cette institution.

Leur colère remonte à lundi 4 mai, où la majorité parlementaire de l’Assemblée nationale avait rejeté la motion de défiance contre le vice-Premier ministre en charge de l’Intérieur, Evariste Boshab, au sujet de sa responsabilité dans l’affaire de la fosse commune de Maluku.

Les députés de l’opposition ont notamment déploré le manque de débat décidé par la plénière au sujet de la responsabilité d’Evariste Boshab dans l affaire de la fosse commune de Maluku.

Depuis ce jour-là, ils ont suspendu leur participation aux plénières de l’Assemblée nationale demandent qu’une mise au point soit faite avant leur retour au sein de l’hémicycle.

Le député de l’opposition, Alexis Lenga expliqué le sens de leur démarche :

«Que le bureau ramène une sérénité au sein de l’hémicycle pour que les règles de jeu soient bien comprises en ce qui concerne les motions de défiance sinon ce comme nous venons accompagner les députés de la majorité dans la protection des membres du gouvernement».

Un comportement déploré par la majorité présidentielle, qui a estimé que cette politique de chaise vide n’a pas de place en démocratie.

«C’est le branle-bas dans l’opposition qui doit se réorganiser parce que nous, nous avons d’une opposition forte qui doit faire des contre-propositions mais ce que nous voyons dans notre hémicycle est une déception pour moi», a souligné le président du groupe parlementaire du PPRD à l’Assemblée nationale, Emmanuel Ramazani Shadary.

De son cote, le président de la chambre basse du parlement a reconnu le caractère obsolète du règlement intérieur de son institution en matière de gestion d’une motion de défiance. Aubin Minaku a cependant assure que la plénière devra lever une option claire à formaliser dans les jours à venir.

« On a peur de voir la tournure que prennent les événements. Que la justice ne mette pas en péril les souverains que nous représentons ici. La motion de défiance est constatée par les signatures. Elle est passée par les voies des urnes au vote par le oui ou par le contre », a soutenu le député Delly Sessanga.

Il a notamment fustigé un militantisme aveugle de la majorité parlementaire.

«La Majorité présidentielle vient de signer la fin de la démocratie dans ce pays, parce que nous ne pouvons plus compter sur les institutions, nous ne pouvons pas être la caution passive à la violation des droits de l’homme et à la violation de la Constitution», a affirmé Delly Sessanga.

« Le charnier de Maluku constitue un fâcheux précédent »

« Le charnier de Maluku constitue un fâcheux précédent », a affirmé le porte – parole des signataires de la motion de défiance, le député José Makila. L’opposition parlementaire a accusé le vice – Premier ministre Boshab du « non – respect de la vie humaine, de l’opacité et de l’obscurantisme dans l’enterrement de 421 corps dans un charnier… »

Le député Makila a fait état, dans la motion de défiance, de « suspicions suffisantes pour mettre en doute la déclaration du vice – Premier ministre en charge de l’Intérieur ».

« Le débat, qui a mobilisé les députés, ce n’est pas le débat sur la question des cimetières ni des morgues. C’est le débat sur les morts d’hommes qu’on a enterrés », a interpellé le député de l’opposition Jean – Lucien Bussa.

« La communauté nationale et internationale s’est mobilisée pour en savoir plus sur l’opération Lititi Mboka » qui avait enregistré, en mai 1990, un seul mort sur le site du campus universitaire de Lubumbashi, a rappelé M. Bussa.

« Tirer les leçons de janvier 2015 »

« L’opposition a compris que la Majorité a choisi la vie de désacralisation humaine », a accusé Jean-Lucien Bussa.

« Nous n’avons pas voulu participer au théâtre de la séance plénière », a confié à la presse le député Lumeya D’hu Malenghi.

Il a accusé la majorité présidentielle d’avoir bloqué « le débat par un problème capital sur la vie humaine ».

« La Majorité a désacralisé et banalisé la vie humaine pour des intérêts politiciens », a précisé le député Lumeya. « L’opposition est sortie de la salle par respect aux morts », a expliqué le député Samy Badibanga, président du groupe parlementaire UDPS et alliés.

« C’est une affaire très grave. Il y a des familles de disparus qui pleurent », a-t-il dit, soulignant qu’il y a « la responsabilité du ministre de l’Intérieur, puisqu’il y a eu mort d’hommes ».

« La Majorité présidentielle n’a pas tiré les leçons du 19 au 25 janvier 2015 », a noté le député Basile Olengo.

En principe, le bureau de la Chambre basse a commis une maladresse dans le respect de la procédure parlementaire à suivre, sans pour autant autoriser le ministre de l’Intérieur à livrer la teneur du message préparé et destiné à ses éventuelles justifications devant l’Assemblée plénière réunie pour débattre de cette question capitale sur l’énigme fosse commune de Maluku.

En 2008, la motion de défiance, qui avait frappé les ministre des Affaires étrangères Alexis Thambwe Mwamba et son collègue des Hydrocarbures, Lambert Mende, était soumise à la voie des urnes, y compris la motion de défiance contre l’ancien ministre d’Etat à la Présidence, David Nkulu, sans tomber dans une ambiance d’agitation euphorique telle que celle vécue le 4 mai 2015 au Palais du peuple.

Alors, Aubin Minaku aurait pu faire la différence dans la gestion rationnelle de la démocratie parlementaire pour montrer à la face de l’opinion publique que le vice Premier ministre en charge de l’Intérieur, Me Evariste Boshab, soucieux de faire passer la vision de sa logique juridique, aura ainsi joui d’un large soutien trop visible de la majorité présidentielle.

Donc le dossier sur la « tombe » ou fosse commune de Maluku , qui n’est pas étouffé aux yeux des experts avisés, reste ouvert pour les respect de la dignité humaine en RD Congo

Rejet de la motion de défiance contre Thomas Luhaka

L’Assemblée nationale a également rejeté, vendredi 8 mai, la motion de défiance initiée contre le vice-Premier ministre en charge des Postes, Téléphones et Télécommunications, Thomas Luhaka Losandjola.

A la base, l’absence de la majorité des signataires et de leur porte-parole qui devaient rendre public le contenu de la motion. Les députés ont commenté diversement cette décision de rejet au niveau de la Chambre basse du Parlement.

Les signataires de cette motion accusaient Thomas Luhaka d’avoir privé aux Congolais la liberté de s’exprimer à travers les réseaux sociaux lors des évènements du 19 et 20 janvier derniers. L’opposition avait organisé des manifestations à travers plusieurs villes du pays pour rejeter la modification de la loi électorale, proposée par le gouvernement.

Sur les 52 signataires de la motion contre Thomas Luhaka, seuls deux avaient signalé leur présence dans la salle des congrès au moment de l’ouverture du débat de cette question.

Pendant ce temps, à la tribune, le décor était bien planté (isoloirs, urnes, tables et chaises) pour décider du départ ou non du vice-Premier ministre du gouvernement.

Certains députés ont estimé qu’il fallait reporter la plénière. C’est le cas de Noël Botakila de la majorité présidentielle.

D’autres députés ont pensé que l’absence du porte-parole des signataires ne pouvait pas faire obstacle à l’examen de la motion. C’est le cas de Papy Nyango de l’opposition :

«Je ne pense que la plénière ne pouvait conclure dans ce sens là. Lorsque plusieurs députés signent l’initiative ‘un contrôle parlementaire et que le tout premier est absent donc l’initiative peut faire l’objet d’un rejet. Je ne crois pas ».

Pour d’autres, l’absence des signataires de cette motion ne pouvait pas se justifiait aussi longtemps qu’ils étaient informés de la programmation de cette question.

Le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku a, de son côté, promis de saisir les signataires en vue de leur faire part de son indignation.