Mort programmée de la Gécamines : le duo Yuma-Kalej mis à nu devant Joseph Kabila

Mardi 3 mars 2015 - 12:03

« La Gécamines SARL achète mal, produit mal, vend mal », « la Gécamines est au fond du trou », « il faut arrêter de creuser », « voilà des milliers de tonnes de substances valorisables extraites à grands frais du sous-sol congolais qui sont dilapidées » , « l’objectif réel du Plan Stratégique de Développement qui n’est autre que la diversion en vue de prolonger le plus possible la juteuse saison Carpe diem », quelques phrases glanées ça et là dans un ouvrage à charge sur la gestion Yuma-Kalej intitulé « Les défis de la Gécamines : sanctuaire du népotisme ou géant minier performant ? ». Du tandem Yuma-Kalej, l’auteur parle d’une « incompétence vertigineuse ». Livre très documenté écrit par Raphaël Ngoy, un ancien ingénieur de la Gécamines (GCM), que C-NEWS se propose d’en faire une recension. L’ouvrage met à nu la gestion du duo Yuma-Kalej, qualifiée notamment de « bricolage ». Une occasion pour le chef de l’Etat aussi de rectifier le tir, lui qui se veut donneur des leçons notamment pour les entreprises privées doit commencer d’abord par balayer devant sa propre porte la GCM. Surtout que Yuma, le vrai patron de la GCM, déclare à qui veut l’entendre qu’il ne répond que du chef de l’Etat surtout qu’il est à la base du programme avec le FMI (PEG II). Le livre de Raphaël passe au crible tous les aspects de sa gestion depuis 2010. Sa sentence est formelle : jamais entreprise n’avait été autant mal gérée que la GCM qui est, selon l’auteur, le champion mondial de gaspillage du cuivre et du cobalt à cause de ses méthodes de rendements. Elle n’est plus que l’ombre d’elle-même.

Durant 4 ans qu’il trône comme président du Conseil d’Administration de la Gécamines SARL (PCA), Albert Yuma Mulimbi a raconté des craques aux rd-congolais et aux élus (sénateurs notamment) en leur faisant croire que la Gécamines allait renouer avec la rentabilité dès 2015. Ce n’était que de la poudre aux yeux ! Car sa société est sur le point de disparaître selon l’auteur du livre. Son Plan de relance de la Gécamines (PSD), que l’auteur a rebaptisé en « Plan de démantèlement de la GCM », a fait flop. L’objectif du PSD était de faire de la Gécamines (GCM) un producteur significatif de cuivre. Il prévoyait qu’en 2015 la GCM allait produire 100.000 tonnes de cuivre et 7.000 tonnes de cobalt. Ce qui correspondait à quintupler la production du métal rouge et décupler celle du cobalt comparées aux productions de 2010. Force est de constater que la GCM près de 5 ans après est loin de cet objectif car sa production ne dépasse guère 10.000 tonnes de cuivre l’an. Et plus grave la majeure partie de cette production insignifiante est le fait des particuliers que la GCM met à contribution pour raffiner ses minerais. C’est le fameux contrat TAF (traitement à façon) sur lequel la GCM s’est fortement appuyé sur l’ère Yuma – Kalej au détriment de ses propres installations métallurgiques.

L’Homme qui aime à se vanter comme un grand manager ayant fourbi ses armes dans le secteur privé (textile et immobilier chez Utexafrica), sera, si l’on y prend garde, c’est lui qui va donner le coup de grâce à la Gécamines. A. Yuma est peut-être bon dans le textile et dans l’immobilier mais aux mines il n’y connaît rien. Son compère révoqué pour détournement (affaire 16 millions USD), Ahmed Kalej, un néophyte aussi. Ce cocktail de deux néophytes à la tête d’une entreprise stratégique mais agonisant (GCM), a fini par ruiner toutes les chances de relance. Ce duo a fait du « bricolage » à la Gécamines. Selon l’auteur, la maladie des rd-congolais c’est de penser que tout le monde peut tout faire. Comme quoi la rentabilité d’une entreprise ne se décrète pas. L’erreur de casting à la GCM la nation entière va la payer chère car la dette de la GCM est une dette nationale.

Pour très mauvaise gestion, la Gécamines SARL risque donc de disparaître nous prévient R. Ngoy. La transformation juridique de l’ex UMHK (Union minière du Haut Katanga) en Société par actions à Responsabilité limitée (SARL) suivie de la nomination du tandem Albert Yuma- Ahmed Kalej en 2010, loin de redresser la barre, a plutôt accéléré la descente aux enfers de ce qui était encore la plus grande société publique dans le secteur minier.

Traitement à façon (TAF) de la GCM, une faute de gestion lourde

Cette mauvaise gouvernance de la Gécamines SARL se fait hélas sous l’œil complice de la tutelle (ministère des mines) écrit Raphaël Ngoy. La première erreur de gestion grave du président de la FEC (fédération des entreprises du Congo), est la perpétuation de son schéma traditionnel de traitement des minerais. La conséquence immédiate c’est des rendements de récupération anormalement faible. La seconde erreur est une erreur de casting dans la nomination des Responsables des grandes Direction de la GCM. Le duo Yuma-Kalej a mis plus de 6 mois pour les désigner. Et cette désignation n’a pas obéit comme dans les entreprises sérieuses à des critères de performance mais à un savant dosage tribal. Les plus expérimentés des cadres GCM ont été ignorés et l’entreprise s’est coupée d’une expertise indispensable d’autant plus, fait rarissime, pour la première fois dans l’histoire de la GCM ni dans son conseil d’Administration ni dans son Comité de gestion il n’y a aucun ingénieur. Dans les deux structures on y a placé des courtisans politiques qui ne comprennent rien aux mines déplorent l’auteur. On a ainsi l’exigence du profil approprié. Mais l’erreur fatale de la GCM se trouve dans le recours systématique au traitement à façon (TAF) dans lequel les autres métaux accompagnateurs du cuivre ont été cédés gratuitement aux particuliers (cobalt notamment).

« Les termes de ces contrats TAF si complexes ont des lourdes conséquences. Au regard de la part des TAF dans la production déclarée par GCM, de sa nature complexe en raison des sources variées des produits, de l’impact massif en termes du contrat sur la rentabilité de cette opération et enfin, objectivité oblige, de l’extrême facilité qu’en l’absence de transparence et sérieux garde-fous, cette opération ne devienne qu’un marché des dupes : un malicieux artifice pour pomper sa,ns scrupules les revenus de la société GCM en la condamnant à la faillite » écrit l’ancien cadre de la GCM à la page 73.

Investissement de 6 millions USD dans CCC puis désengagement, à quoi joue la GCM

Les autres travers de la gestion Yuma-Kalej sont à chercher notamment dans les activités annexes de la GCM : notamment les installations de calcaire, chaux et ciment (CCC) que le Management qualifie de centre des profits qui avait la seule usine à chaux indispensable dans la production du cobalt. Les autres miniers l’importent en Zambie notamment. Après y avoir investi 6 millions USD qui ont mis CCC en position de produire, la GCM s’efface et consent même gracieusement en dépit de ses apports substantiels de ne détenir qu’un bien maigre 35% de parts sociales. Elle est y minoritaire. A quel jeu joue-t-elle s’interroge l’auteur ? Pourtant il n’est pas encore trop tard selon l’auteur du livre.

Héritage d’un lourd passif du comité Fortin/Mukasa, pas une excuse

Avec un passif énorme non assurable de plus de 1.5 milliard USD, une production plafonnée à moins de 6% du record historique de 1986 (480.000/cu), dispersion de la Gécamines dans plusieurs partenariats infructueux, la cession des meilleurs gisements, la cession des meilleurs concentrateurs et des meilleures usines, la Gécamines SARL- dont la transformation visait la rentabilité et l’efficacité- était une société à réinventer de bout en bout et dont la réussite ne s’accommoderait d’aucune complaisance écrit l’auteur. Pour réussir il fallait surmonter trois préalables poursuit-il : Mettre fin au déni du réel, arrêter de croire qu’il y a une façon congolaise d’opérer dans l’industrie minière, et enfin l’exigence d’un profil approprié pour la tâche. Selon l’auteur aucun de ses trois préalables n’a été surmonté. En dépit de ce passif lourd, la GCM SARL lancée en 2010 avait encore des ressources estimées à 4 millions de tonnes de cuivre dont environ 15% de réserves certaines et un certain nombre des gisements confiés à des partenaires défaillants dont la possible récupération lui donnerait encore plus d’arguments pour réussir. La disparition programmée de la GCM comme celle déjà survenue de la SODIMICO peut-être stoppée. Produire du cuivre ou du cobalt n’est pas mystérieux selon R. Ngoy. Nos ancêtres produisaient mieux que la GCM s’amuse-t-il à le rappeler. Les Lamba notamment raffinaient mieux le cuivre que la GCM de Yuma. Il faut pour sauver la GCM confier sa gestion aux meilleurs professionnels du domaine qui appliqueront une urgente et agressive reforme. À défaut prévient l’auteur l’épitaphe de la GCM se lira bientôt (voir épitaphe ci-dessous). Joseph Kabila doit absolument réagir car sinon il emportera la responsabilité de la disparition de la GCM qui est inéluctable si le management reste le même. A. Yuma aura, dans ce cas réalisé, le double exploit : de priver la RDC d’un programme avec le FMI mais aussi d’avoir contribuer à la disparition de la GCM. De la gestion Yuma-Kalej, l’auteur écrit ceci en guise de conclusion, « quatre années bien sonnées de ce népotisme et de discrimination ostentatoires ont accouché d’un monstre, champion mondial dans le gaspillage de ressources, en valeur relative la société la plus polluante de l’Industrie du cuivre mondial, produisant la plus mauvaise qualité de métaux qui sont vendus avec une décote énorme : la Gécamines SARL sous ce nouveau management est le meilleur exemple d’un échec total, complet, un échec parfait ». en lisant l’ouvrage, le président de la FEC a perdu tout crédit, au chef de l’Etat d’en tirer toutes les conséquences et donner à la GCM un nouveau souffle.

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